Hommage à Jean-Yves CROCHET

JEAN-YVES CROCHET (1941-2023) nous a quittés.

… un pionnier discret.

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La vie est une belle aventure … qui se termine mal. Jean-Yves a certainement vécu une belle aventure et nous avons partagé un bout de son chemin. Au premier contact, l’homme semble bourru mais très vite on reconnait le bon vivant, la plaisanterie facile voire la contrepèterie, et les yeux plissés, le regard malicieux, l’homme était un joyeux compagnon.

Jean-Yves Crochet était géologue universitaire, maître de conférences à l’université de Montpellier où il a soutenu une thèse de doctorat en 1978 : « Les marsupiaux du Tertiaire d'Europe ». Très tôt, très vite, il s’est intéressé à l’approche patrimoniale de la géologie et à la médiation de ses connaissances scientifiques.

Dès 1980 – déjà ! La loi ne date que de 1976 - il met en œuvre l’outil juridique « réserve naturelle volontaire » (RNV, instauré par la loi de 1976 relative à la protection de la nature) pour protéger un géotope remarquable : Montredon sur la commune de Montouliers ; suivront Robiac (1989), Saturnin-Garimond et Aumelas (1993) puis Coumiac (1998) toutes dans l’Hérault.

(Respectivement :
> Niveau repère de la zone MN10 de l’échelle mammalienne biostratigraphique du Néogène
> Niveau repère de la zone MP13 de l’échelle mammalienne biostratigraphique du Néogène
> Niveau repère des zones MP 13 et MP 17 de l’échelle mammalienne biostratigraphique du Néogène, découverte du premier mammifère primitif (Crétacé supérieur)
> Stratotype international (« clou d’or ») de la limite Frasnien/Famennien)

Dans le même temps il crée ASPROGEO (association pour la protection du patrimoine géologique dans l’ouest) support associatif indispensable pour une action publique en dehors de l’université. Dans ce cadre, après avoir publié en 1974 une révision des insectivores des phosphorites du Quercy, il dresse (avec B. Marandat) un inventaire des phosphatières du Quercy (1990-1992) pour la DRAE (avec Patrick Cabrol) et l’Institut des sciences de l’évolution de Montpellier et y crée la RNV de Lavergne (1992) dont ASPROGEO est gestionnaire (première protection de phosphatières du Quercy). Cet inventaire – le premier inventaire avec une évaluation des sites - a servi de base au dossier (2013) de réserve naturelle nationale du Lot, au sein du PNR du Quercy, aujourd’hui « géoparc mondial UNESCO ». Il sera suivi de l’inventaire des sites paléontologiques du Gers (1996, avec JL Welcomme). Dans ce contexte il rédige (2000) le n°116 de la collection pédagogique Bibliothèque du travail « Piège à fossiles, les poches à phosphates du Quercy ». La connaissance, la protection, la médiation.

Jean-Yves Crochet a été pendant une vingtaine d’années un compagnon de route régulier de la commission « patrimoine géologique » de RNF, mais le Languedoc suffisait à ses préoccupations. Il a rejoint une réunion « ouverte » de la commission en 1988 sur les modifications législatives sur le patrimoine géologique, pour lesquelles il avait déjà des propositions. Il était alors mobilisé sur « l’affaire de Millau » (pillage d’un site paléontologique/plésiosaure de Tournemire) qui retenait l’attention des protecteurs du patrimoine géologique par son exemplarité en termes de droit. Mais – le savions-nous alors – lorsque la commission s’est créée en 1986 dans « son » Languedoc, Jean-Yves avait déjà créé deux RNV ! Il nous accompagnera assez régulièrement jusqu’en 2008. Spéléologue, il sera des nôtres sur la RNN « grotte TM 71 » (1994) dans l’Aude et surtout il accueillera la commission à Clermont-L’Hérault (2007) nous faisant découvrir La Lieude et ses graves problèmes de conservation et bien sûr le « clou d’or » de Coumiac. A cette occasion, il présentait l’étude conduite par ASPROGEO (J-L. Welcomme), à la demande du Conseil général de l’Hérault, pour envisager le classement en réserves naturelles régionales (outil juridique créé en 2002) des 6 RNV existantes ; ce transfert de statut ne s’est pas fait et aujourd’hui ces 6 géotopes ne bénéficient plus de protection juridique depuis 2002 … belle reconnaissance publique du travail pionnier de Jean-Yves Crochet.

(La Lieude : classée en RNV en 1986, transférée en RNR en 2005 mais classement abandonné. JYC s’est soucié de ce géotope mal géré, en danger, mais n’est pas à l’origine de sa protection.)

Tout cela a très naturellement légitimé Jean-Yves à la présidence de la Commission régionale du patrimoine géologique pour la réalisation de l’inventaire régional, son travail de pionnier associatif devenait « officiel » !

Nous n’évoquerons pas ici son travail universitaire mais indiquons cependant que son regard de géologue l’a aussi rapproché des archéologues. Il a ainsi notamment contribué à des découvertes importantes sur l’apparition de l’Homme dans le Languedoc.

Soulignons enfin que son intérêt pour l’enseignement au sens le plus large l’a conduit entre autre à la réalisation d’un dossier pédagogique remarquable (1991) sur l’origine de la vie pour le Centre de télé-enseignement, à l’accompagnement du Musée de la spéléologie de Courniou (Hérault) et en 2020 à la publication de « Géotourisme en Hérault » (éd. Biotope).

La vie est toujours trop courte pour nombre d’entre nous. Jean-Yves Crochet a bien occupé la sienne, dans l’intérêt général. Il a été un des pionniers de la prise en compte du patrimoine géologique, gardons sa mémoire.

Avec une pensée émue pour Claude, son épouse, et Sylvie, sa fille.

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Max Jonin (SGMB et RNF) 11.11.2023

Merci à Christine Balme, Françoise Besset, Patrick Cabrol, Sylvie Messina-Crochet et Thierry Pélissié.

.… peut-être aurait-il été content de savoir qu’aujourd’hui une de ses anciennes étudiantes de l’université de Montpellier – Pauline Coster – travaille sur la RNN d’intérêt géologique du Luberon et préside la com’géol’ de RNF.

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Photo 1 - Non ce n’est pas le Cdt Massoud mais Jean-Yves au Pakistan et je pense qu’il aurait aimé que l’on garde cette image. (Photo Pierre-Olivier Antoine)

Photo 2 - C’est bien lui, kenavo Jean-Yves (photo Laurent Marivaux)